vendredi 21 octobre 2011

Et si nous pensions Design Universel pour avancer ?

Je sors tout juste d'une conférence organisée par l'école de design de Nantes, dont le sujet général était centré sur la compréhension du comportement des usagers et l'identification des besoins de consommation et de services d'un individu.
Un débat a particulièrement retenu mon attention. Organisé par Catherine Bouvard, responsable de cursus à l'école de design, Marine Semichon, architecte diplômée d'état chez David Bonnett Associates à Londres, et Florent Orsoni, directeur exécutif de Tutti Mobi et conseiller auprès de ministères et collectivités locales en matière d'accessibilité, le débat en question avait pour thème l'approche positive de la contrainte comme génératrice de service supplémentaire et fut l'occasion d'échanges au sujet d'un concept émergeant et prometteur, celui du Design pour tous, appelé encore Design Universel.

"Design for all est la conception d'environnements, produits et services afin que toutes les personnes, futures générations incluses sans restriction d'âge, de genre, de capacité ou d'origine culturelle, puissent avoir les mêmes opportunités de comprendre, d'accéder et de participer pleinement aux activités économiques, sociales, culturelles et de loisir, de manière la plus indépendante possible"

Plus qu'un concept, il s'agit ici sans doute d'un véritable état d'esprit, d'un véritable objectif de société, qui veut faire d'une contrainte forte, en l'occurrence l'accessibilité au plus grand nombre, un axe de développement et d'innovation susceptible de faire naître des activités économiques nouvelles.
L'idée repose sur le souhait de proposer des solutions au service de l'Homme dans sa plus totale diversité, et non plus en considérant qu'il y a un Homme type ou qu'il y a des Hommes avec des besoins si particuliers qu'ils finissent par être considérés comme exceptionnels et marginaux (l'exemple des handicapés est une illustration de cette marginalisation dont on souhaite sortir avec cette idée de Design Universel). Présenté autrement, il convient ici de vouloir rester généraliste dans son offre tout en touchant un maximum de cibles diversifiées. Il convient de ne pas prendre la contrainte comme une contrainte, mais bien comme potentiel levier d'innovation.

Les champs d'application du Design Universel sont vastes : les transports, les communications, l'information, l'accès aux lieux publics, les biens courants, les loisirs, ... Imaginer et concevoir des musées qui puissent être visités au même rythme, avec les mêmes regards, en partageant exactement les mêmes infrastructures par une personne handicapée, étrangère, jeune ou vieille. Rendre possible l'utilisation d'un téléphone à écran tactile à un déficient visuel (au passage, qualifier de "tactile" un écran qui ne peut aujourd'hui pas être utilisé par un non-voyant est assez paradoxale ...). Faire en sorte qu'un lieu de vie puisse s'adapter au fil du temps aux différentes contraintes des étapes de la vie d'une famille qui se construit, s'agrandit, se disperse, vieillit. Adapter certains outils de bricolage ou ménagers à des utilisateurs privés de certaines capacités ou pas toujours suffisamment "formés" à leur utilisation. Voilà autant de sujets qui illustrent les apports potentiels de ce Design Universel.

La mise en oeuvre d'une stratégie de Design Universel a été il y a quelque temps déjà proposée par Bob Zeidman à travers une méthodologie qui fait la part belle à 7 critères et qui permettent du juger de la pertinence d'un produit ou d'un service en matière d'accessibilité :

  • Utilisation équitable
  • Flexibilité
  • Simple et intuitif
  • Perceptibilité de l'information
  • Tolérance à l'erreur
  • Espace pour l'utilisation
  • Effort physique minimal
Toyota est aujourd'hui reconnue dans le monde pour son implication dans le domaine du Design Universel que l'entreprise nippone souhaite déployer pour favoriser sa politique de qualité.

Le débat d'aujourd'hui fut passionnant et il a en particulier mis en exergue un certain nombre de paradoxes auxquels la notion de Design Universel devra sans doute être confrontée avant de pouvoir être considérée comme une avancée mature :
  • Personnalisation ou Universalité ?
  • Design ou Banalisation ?
  • Rupture ou Incrémentation ?
  • Sophistication ou Simplicité ?
  • Instantanéité ou Durabilité ?


Le Design Universel ne serait-il pas une autre tendance propice à l'innovation parmi celles que j'avais déjà répertoriées par ailleurs il y a quelques temps ? ...

2 commentaires:

  1. Bonjour,
    merci pour cet article très intéressant qui expose clairement l'approche théorique du design for all. Mais avez-vous des exemples concrets d'application de cette démarche, notamment en association avec des publics handicapés ?

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  2. les exemples les plus probants sont l'aménagement du château de Versailles ainsi que de celui du plus vieux musée d'Angleterre classé par le MLA, qui ont tout deux récemment fait l'objet de re-design complet selon les principes du design universel afin de favoriser leur accès au plus grand nombre dont les handicapés, personnes âgées et malvoyantes.

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